Reportage
Agrandir plutôt que construire pour valoriser le patrimoine bâti

Chaque mois, nous vous faisons découvrir une habitation exemplaire sur le plan écologique. Direction le quartier du Schoenberg, à Fribourg, avec la mue d’une maison individuelle datant des années 1960.

Agrandir plutôt que construire pour valoriser le patrimoine bâti
À Fribourg, le Schoenberg est connu pour son architecture tout en verticalité. Sortis de terre dans les
années 1970, les tours et les immeubles y dominent d’anciennes villas individuelles bâties avant le développement de ce quartier résidentiel riche de 10’000 habitants et d’une centaine de nationalités. Dont cette petite maison entourée d’un joli jardin au lieu-dit Vieux-Chêne, achetée en 2018 par l’architecte Luc Trottier et sa famille. «L’objet était en bon état, mais comptait beaucoup d’espace perdu. Le logement d’environ 100 m² était cantonné au rez supérieur et l’étage inférieur accueillait sur une surface tout aussi grande le local technique, un garage, une buanderie, un abri PC ainsi qu’une pièce utilisée comme atelier et pour divers rangements. Le potentiel d’agrandissement était donc très intéressant», raconte Luc Trottier, l’un des directeurs associés du bureau Lutz Architectes, à Givisiez (FR).

Surélévation en bois
Commencés à l’automne 2018, les travaux de transformation ont permis de tripler la surface habitable de l’objet en réaffectant une partie du rez inférieur et en y créant une extension en béton ainsi qu’une surélévation en bois à l’étage. «Ce matériau offre l’avantage d’être très léger. Les bâtiments anciens ont souvent beaucoup de marge au niveau des appuis, car dans les années 1960 les calculs n’étaient pas aussi précis qu’ils le sont aujourd’hui et les architectes comptaient donc très large. Nous avons pu effectuer cette surélévation sans avoir à renforcer la maçonnerie d’origine», explique Luc Trottier. Grâce à ces ajouts, cette maison abrite désormais trois logements au lieu d’un seul initialement: un appartement de 4,5 pièces sous les toits, un autre de 6,5 pièces au rez supérieur ainsi qu’un studio de 35 m2 donnant sur le jardin.
Maison à énergie positive

Le bâtiment existant ainsi que la surélévation ont été isolés avec de la laine de bois, alors que la laine de pierre a été privilégiée pour le rez inférieur. Les crépis ont été refaits à la chaux et les façades recouvertes de lames de sapin blanc lasuré. Un matériau choisi pour sa durabilité et comme un clin d’œil aux origines québécoises du propriétaire des lieux. «Le fait d’emballer ainsi la maison et ses deux nouveaux éléments nous a permis de donner un ensemble visuel cohérent à la structure. Et puis, les lames ont une durée de vie d’une cinquantaine d’années et peuvent être remplacées à l’unité en cas de besoin ou de dommages», poursuit l’architecte. Le bois a également été préféré pour l’aménagement intérieur, avec des parquets en chêne dans toutes les pièces, hormis les zones d’entrée et la cuisine, qui sont en carrelage.Fonctionnant au mazout dans sa version d’origine, le chauffage et la production d’eau chaude de la maison sont aujourd’hui alimentés par une pompe à chaleur avec sonde géothermique. Quant à l’électricité, elle provient des panneaux photovoltaïques installés sur le toit qui produisent davantage d’énergie que celle qui est consommée. «Les trois logements sont non seulement autosuffisants annuellement, mais l’excédent est redistribué dans le réseau», précise encore Luc Trottier.Le bureau Lutz Architectes a fait de la transformation de biens immobiliers l’une de ses spécialités. «Rénover des bâtisses existantes offre de nombreux avantages. D’abord car cela permet de valoriser une structure sans avoir à démolir et évacuer des matériaux encore utilisables. Mais aussi parce que les autorisations et procédures sont beaucoup plus souples et rapides pour une transformation que pour une construction. D’un point de vue écologique et économique, c’est donc une opération doublement gagnante», conclut Luc Trottier.

Texte(s): Aurélie Jaquet
Photo(s): Corinne Cuendet, Clarens/Vincent Levrat

En chiffres

  • 1962, année de construction de la bâtisse initiale qui abritait un seul domicile.
  • 3 logements font désormais partie de la maison: un appartement de 6,5 pièces, un autre de 4,5 pièces et un studio.
  • 8 mois environ, la durée des travaux de transformation.
  • 740 m2, la surface de la parcelle.

L’architecte

Luc Trottier est l’un des sept associés du bureau Lutz Architectes, à Givisiez (FR), fondé il y a plus de quarante ans. Originaire du Canada, il a passé son diplôme de technicien en bâtiment au Québec, avant de poursuivre avec un bachelor en architecture, un master à Toulouse, puis un postgrade en bioclimatique et développement durable à l’EPFL.

+ d’infos www.lutz-architectes.ch