Antennes GPS et ordinateurs de bord subtilisés: les agriculteurs vaudois touchés par une série de vols
Ordinateurs de bord, antennes GPS, consoles de guidage. Depuis début novembre, plusieurs agriculteurs se sont fait dérober du matériel informatique à l’intérieur ou à l’extérieur de leurs machines, plus particulièrement sur leurs moissonneuses-batteuses ou leurs tracteurs.
Michael Demont fait partie des victimes. L’exploitant de Vullierens (VD) a subi une effraction le mois dernier. En semaine, une nuit, il s’est fait dérober une antenne GPS et deux écrans: sa console principale et celle dédiée au guidage. Montant du butin: 30 000 francs.
Une douzaine de cas en dix jours
Face à ce phénomène, la police cantonale vaudoise a réagi, faisant circuler une mise en garde. «Nous avons été intrigués par la fréquence de ces méfaits, lâche Pascal Fontaine, chef de la division spécialisée dans la prévention de la criminalité à la police vaudoise. Un vol par mois ne nous aurait pas alarmés, mais en novembre nous en avons dénombré une douzaine en dix jours.» Selon l’adjudant, c’est cette prolifération de cas qui a valu ce message de prévention.
Cet appel a surtout été diffusé dans les communes du Gros-de-Vaud où les larcins se sont concentrés. «Géographiquement, le phénomène se limite au nord du canton», acquiesce Pascal Fontaine. Contactées, les forces de l’ordre des autres cantons romands ne constatent, elles, aucune recrudescence de vols de matériel électronique.
Vols ciblés
«Les voleurs doivent faire partie d’un réseau bien informé, souligne Michael Demont. Ils ont l’air de savoir exactement ce qu’ils cherchent.» Dans la cabine du tracteur où a eu lieu l’effraction, l’agriculteur avait d’autres types de matériel, également coûteux. Antennes GPS et écrans mis à part, rien n’a été dérobé. Un constat partagé par ses collègues. «Certains ont des systèmes de géolocalisation similaires provenant d’autres marques, et là non plus, rien n’est parti.»
Outils incontournables
Parce qu’ils permettent de déterminer le positionnement exact du tracteur dans les champs lors des semis ou de la fauche, les outils de géolocalisation – associés parfois à des systèmes de conduite assistée ou de traitements automatisés – sont devenus d’incontournables alliés pour les paysans. Particulièrement pour ceux qui, comme Michael Demont, effectuent des travaux pour tiers sur des terrains qui ne leur sont pas toujours familiers.
Dans sa mésaventure, celui qui est également député au Grand Conseil vaudois a toutefois pu s’adapter: «J’avais prévu de finir de semer du blé chez un client au moment du vol. La météo m’a permis d’arrêter le tracteur trois jours, mais j’ai dû travailler tout le week-end pour compenser. J’ai eu la chance de pouvoir compter sur le GPS prêté par mon cousin, agriculteur lui aussi.»
Surtout du John Deere
Les concessionnaires de matériel agricole prêtent également parfois des consoles en remplacement, lorsque leur stock le permet. C’est le cas de la société Robert Aebi Landtechnik SA, dont une succursale vaudoise se trouve à Chavornay. Celle-ci vend en particulier la marque John Deere. Or, comme nous a confiés un agriculteur de la région, «les vols, c’est surtout du John Deere».
Conseiller spécialisé dans cette marque chez Robert Aebi Landtechnik SA, Raphaël Charrotton confirme: «Le matériel mobile de John Deere se fait régulièrement voler chez nos clients. Particulièrement les récepteurs de dernière génération, les modems RTK, et les écrans universels.»
Leur avantage? «C’est un matériel facilement démontable, que l’on peut combiner avec des antennes des générations précédentes», indique le conseiller. Un atout non négligeable pour les agriculteurs. Ne devant débourser qu’une fois les sommes allant de 3500 à 10 000 francs pour un récepteur et de 5000 à 9000 francs pour une console, ils peuvent les déplacer au gré des machines à utiliser. «Mais évidemment, l’aspect mobile profite aussi aux voleurs.»
Sur les champs de bataille en Ukraine?
«Quand du matériel John Deere est dérobé, le rapport de police nous est transmis par l’intermédiaire du client et le vol est spécifié dans les bases de données de la marque», note Raphaël Charrotton. Fonctionnant via un système de licence, le matériel indiqué comme subtilisé ne pourra être renouvelé sans alerter la marque au cerf. Un cas de figure que Raphaël Charrotton n’a néanmoins encore jamais rencontré.
Se basant sur un reportage de TF1 concernant des vols similaires, certains agriculteurs imaginent que ces outils transitent jusque dans les pays de l’Est, plus particulièrement sur les champs de bataille ukrainiens. Si nous n’avons pu vérifier ces informations, une chose semble claire, ce matériel n’est pas utilisé en Suisse: «Les nouvelles vont vite dans le milieu. Si c’était mon voisin qui me l’avait piqué, je le saurais tout de suite», illustre Michael Demont.
Conseils difficiles à appliquer
Côté prévention, la police conseille de stationner les machines dans des hangars fermés, de verrouiller systématiquement les engins, et de s’équiper d’alarmes, d’antivols et de clés antidémarrage. Des conseils parfois difficilement applicables. «On est plusieurs à travailler sur les machines, précise Michael Demont. Je ne vais pas prendre mon GPS avec moi quand je m’arrête à 2h du matin et demander à mon employé de venir le rechercher dans ma chambre à coucher quand il reprend le travail à 7h.»
Lors du vol, l’agriculteur de Vullierens avait débranché et rentré son matériel dans son tracteur fermé à clé, comme le conseille la police. La vitre du véhicule a été brisée par les malfrats. «Et malheureusement, je ne peux pas investir des centaines de milliers de francs dans un hangar», déplore-t-il.
Les forces de l’ordre analyseront prochainement ces larcins afin d’ébaucher une vision d’ensemble du phénomène. Les agriculteurs, eux, restent pragmatiques. «C’est la faute à pas de chance, tempère Michael Demont. Si j’avais été le premier, ça aurait été dur, mais comme la police nous avait mis en garde, je ne tombais pas des nues. En revanche, ça me ferait plus mal si les assurances venaient à ne plus vouloir nous rembourser.»
Casco ou inventaire agricole
Comment ces cas de vol sont-ils pris en charge par les assurances? Contactée, La Mobilière, dont certains employés sont spécialisés en sinistres agricoles, indique assurer les GPS des paysans de deux manières. «Ceux qui sont fixés au tracteur sont couverts par l’assurance casco complète et partielle du véhicule en tant qu’accessoire fixe annexe. En cas de vol, ils sont remboursés à leur valeur actuelle, après déduction de la franchise, indique Isabelle Schmidt-Duvoisin, porte-parole de La Mobilière. Les GPS mobiles sont couverts par l’assurance inventaire agricole de l’exploitation. Et, en cas de vol, remboursés à leur valeur à neuf, après déduction de la franchise. Dans les deux situations, les personnes qui s’assurent doivent mentionner explicitement ces GPS ainsi que leur valeur dans leur police d’assurance ou dans l’inventaire.»
De manière générale, Raphaël Charrotton rappelle régulièrement à ses clients agriculteurs de ne pas omettre de modifier leur police d’assurance lors du rééquipement d’une machine.
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