Plus robustes, les PIWI se profilent comme les cépages du futur
Tendre à des pratiques plus durables devient une préoccupation croissante chez les viticulteurs. Pour preuve, le nombre de reconversions en production biologique est en nette augmentation. Si cette évolution permet de diminuer entre autres la pollution des sols et protège l’environnement, elle a également un impact positif sur les coûts de production.
Des cépages robustes sont une des clés pour pouvoir réduire de manière significative l’utilisation de pesticides. Ces variétés sont dénommées «PIWI», un acronyme allemand (Pilzwiderstandsfähige Rebsorten) qui signifie cépages résistants aux champignons. Ceux-ci supportent davantage les maladies fongiques causées par le mildiou, l’oïdium et le botrytis.
Intérêt grandissant
Actuellement, 120 nouveaux cépages résistants sont cultivés en Suisse pour une surface totale de près de 450 hectares, ce qui représente 3,2% des vignes helvétiques. Une tendance à la hausse: la part des PIWI a doublé ces six dernières années. Deux cépages sont particulièrement en vogue: le divico, un rouge, a augmenté sa surface cultivée de 12,8% entre 2022 et 2023 pour un total de 80 hectares, alors que le souvignier gris, un blanc, a progressé de 31%.
Ces cépages sont créés en pollinisant manuellement des fleurs femelles avec du pollen recueilli sur le parent mâle d’un cépage différent. L’objectif est de combiner la résistance naturelle de certaines vignes sauvages avec les qualités aromatiques et gustatives des variétés traditionnelles européennes. Mais il ne s’agit en rien d’une manipulation génétique. Certains, comme le divico, qui est né en 1996 à l’Agroscope de Pully (VD), ont été développés par la Confédération. D’autres par des privés.
Valentin Blattner, de Soyhières (JU), crée ainsi chaque année de nouveaux cépages résistants. «Voilà trente-cinq ans qu’il effectue des recherches dans le monde entier, relève sa fille Olivia Hänggi-Blattner. Si, à ses débuts, il était considéré comme un marginal, l’intérêt est désormais grandissant pour ce type de cépages. Il s’agit d’un travail de longue haleine, car on compte au minimum sept ans pour développer une nouvelle variété.»
Traitement conseillé
Malgré leur caractéristique, il est conseillé de traiter ces vignes au minimum une fois par an, afin d’éviter l’apparition de souches de champignons ayant contourné la résistance de la plante. Ce traitement permet de profiter plus longtemps de la robustesse de ces cépages.
Au Domaine des Alouettes, à Satigny (GE), Florian Ramu a vinifié du divico dès 2017, en rouge et en rosé, une première. Le succès a été au rendez-vous, sa cuvée rouge remportant en 2020 et 2022 le premier prix du concours international des vins PIWI et collectionnant de plus les médailles d’or.
Trouver son public
Avec près d’un hectare qui lui est consacré, il a longtemps été le plus grand producteur du canton. «Proposer un cépage innovant m’a tout de suite convaincu, s’enthousiasme le Genevois. Mais le divico reste un produit de niche: je vinifie dix autres cépages. Élevé en barrique douze mois, il produit un vin assez puissant, avec une note de cerise. Le goût guide en priorité l’acheteur, mais si celui-ci a une sensibilité pour des vins plus écologiques, son choix devrait se porter sur ce type de cépage. Trouver les canaux de vente pour ces vins n’est pas forcément évident.»
Du côté des cavistes, le constat est similaire. «Les clients ne viennent pas directement vers nous en nous demandant ce type de produits, probablement car ils sont encore jeunes et méconnus, observe Titouan Roche, adjoint-gérant de Mövenpick Vins Crissier. Notre rôle est justement de faire découvrir ces cépages. Ils sont commercialement intéressants, car ils présentent un goût intense et riche, avec peu d’acidité.»
Sachant qu’une nouvelle parcelle est plantée au minimum pour une durée d’une quarantaine d’années, on comprend que les vignerons jouent la prudence. Mais vu le grand nombre de nouvelles variétés, aux propriétés très différentes, nul doute que leur potentiel est loin d’avoir été exploité.
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