En quête de billets cachés, les chiens sont de fins limiers

La Police cantonale vaudoise forme des chiens à la détection d’argent liquide, en se basant sur leurs capacités olfactives. Cette compétence est particulièrement utile dans les affaires liées au trafic de stupéfiants.
20 août 2024 Véronique Curchod
Sherlock à l'entraînement avec le sergent-major Vincent Jean-Mairet, responsable de la formation des conducteurs de chien.
© François Wavre / Lundi13

Si on dit que l’argent n’a pas d’odeur, l’expression ne concerne nullement les chiens. Leur flair spectaculaire permet en effet de dénicher des billets de banque soigneusement cachés par des trafiquants en tout genre. La brigade canine de la Police cantonale vaudoise, appuyée par les polices municipales, possède une vingtaine de ces fins limiers, animaux en formation compris. Ceux-ci sont tous entraînés à rechercher des stupéfiants, avant de suivre une spécialisation supplémentaire en billets de banque.

Les deux domaines sont d’ailleurs intimement liés, les transactions en lien avec la drogue passant quasi exclusivement via de l’argent physique. «Les dealers se débarrassent rapidement de leur marchandise, mais gardent en revanche l’argent plus longtemps à leur domicile, explique le sergent-major Vincent Jean-Mairet, responsable de la formation des conducteurs de chien. Le retrouver peut permettre de faire avancer les enquêtes.»

Flair imparable

En outre, plusieurs études ont démontré que 70 à 90% des billets en circulation sont contaminés par de la drogue, à la suite de leur manipulation par des gens qui en consomment. Le papier poreux retient en effet facilement ces substances. Les canidés sont principalement engagés lors de perquisitions liées au trafic de stupéfiants, dans des appartements ou parfois lors de deals de rue.
La brigade canine intervient également, mais plus rarement, dans des affaires liées au blanchiment d’argent et lors de fouilles de colis ou de voiture. «Dans un autre canton, un chien «stups» d’une police municipale vaudoise, engagé lors de sa permanence cantonale, a découvert derrière une paroi en bois un joli magot que les enquêteurs n’avaient pas trouvé malgré plusieurs perquisitions», se réjouit le sergent-major.

En chiffres

  • 2017, les premiers canidés de la gendarmerie vaudoise sont officiellement formés pour la détection de billets de banque.
  • 18 chiens, dont 6 pour les stupéfiants et les billets, 8 pour les explosifs, 3 pour les cadavres et 1 pour les produits accélérateurs d’incendie.
  • 2 races principales: le berger allemand et le berger belge malinois.
  • 10 ans, l’âge jusqu’auquel ils sont actifs.
  • 200 000 à 500 000 francs trouvés en moyenne annuellement par des chiens en Suisse.

Mémorisation précoce

Sherlock, un berger malinois de 2 ans et demi, nous fait la démonstration de ses compétences olfactives lors d’un entraînement. Focalisé sur son maître qui agite un jouet afin de capter son attention et de l’encourager, il met moins d’une minute pour dénicher la liasse de billets de 10 francs, cachée derrière un poteau en béton. La truffe rivée sur sa trouvaille, Sherlock se couche et reste immobile jusqu’à ce que son maître valide sa découverte et le libère. Tout le travail est basé sur le jeu.

«Le chien comprend vite que la manière la plus rapide d’être récompensé est de trouver ce qu’on lui demande.» Le conditionnement commence au plus jeune âge. Dès 3 mois, le chiot est habitué à s’amuser avec un tube en plastique rempli de petits bâtonnets contenant les molécules à rechercher. Cette imprégnation indirecte, qui contribue à une mémorisation précoce de certaines substances, permet d’associer ces effluves à un moment plaisant et ludique.

Reconnaître différentes devises

Les canidés de la gendarmerie devant être polyvalents, ils commencent néanmoins leur formation par la défense, dont l’objectif principal est de permettre l’interpellation d’individus, avec ou sans mordant. Après l’examen opérationnel de défense à l’âge de 2 ans, ils enchaînent avec leur spécialisation dans les stupéfiants pendant deux mois. Il ne leur faudra ensuite que quelques jours pour être capables d’identifier les billets de banque.

Pour être certain que ces bêtes soient capables de détecter les différentes coupures et devises qu’elles peuvent rencontrer, la brigade les sensibilise à un maximum d’éléments: dollars, francs suisses et euros composent un pot-pourri de molécules décelables uniquement par l’animal. «Les billets neufs peuvent ne pas avoir la même odeur que les usagés. Mais on ne sait pas exactement sur quoi se base un chien pour détecter des coupures: l’encre, le papier ou d’autres molécules liées aux composants des systèmes de sécurité.»

Travail bref et intense

Tout au long de l’année, 24h/24, un canidé est prêt à intervenir si besoin, un service de tournus leur permettant de se relayer en permanence. Le travail du flair étant très gourmand en énergie, l’opération dure en moyenne 20 minutes. «Il faut réussir à continuer à motiver l’animal: s’il ne trouve rien, cela peut être décourageant pour lui. On essaie donc de finir toute intervention sur une note positive, en cachant au besoin notre propre matériel.»

Et afin d’aiguiser leurs capacités, des entraînements avec des scénarios au plus près de la réalité ont lieu une dizaine de fois au minimum par année. «Ce travail me plaît, notamment à cause de la finesse nécessaire pour arriver à de tels résultats, s’enthousiasme le sergent-major. Ceux-ci justifient toutes les heures de travail. Chaque maître-chien partage une relation très forte avec son animal: on doit pouvoir se faire entièrement confiance. Et on passe davantage de temps avec les canidés qu’avec notre propre famille.»

Diverses spécialisations

La détection d’argent ou de drogue n’est pas le seul talent des chiens de la Police cantonale vaudoise. Elle possède aussi des animaux spécialisés en recherche d’explosifs, de cadavres et de produits accélérant en incendie. En outre, des canidés capables de trouver des clés USB, portables et tablettes notamment sont désormais utilisés en appui dans d’autres cantons. Une des dernières nouveautés en date est la formation d’un chien équipé d’une caméra frontale et d’une autre arrière. Dirigé à distance, il effectue des reconnaissances sécurisées, place du matériel dans des zones difficiles d’accès et acquiert du renseignement vidéo et audio, en toute sécurité, pour le Détachement d’action rapide et de dissuasion (DARD), une unité spéciale de la Police cantonale vaudoise.

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