Trois variations sur le jardin des délices
1
Naturalisme expansif
À Conches, entre l’Arve et la frontière française, pour un client privé, l’architecte paysagiste Guilhem de Corneillan a transformé les plates-bandes de gazon en dévers, «qui donnaient l’impression d’un jardin étriqué», en un luxuriant spectacle naturaliste. «Pour apporter de la profondeur, j’ai travaillé sur les hauteurs intermédiaires qui étaient absentes sur la parcelle, en plantant des massifs de vivaces», explique le spécialiste, diplômé d’HEPIA, qui a fondé son bureau à Carouge (GE) en 2017. Son intervention concerne une petite portion des 12
000m2 de terrain de l’immense propriété. Le passionné de végétaux a mêlé pommiers ornementaux, variétés d’asters et graminées comme les très graphiques Hakonechloa japonaises ou Imperata cylindrica au feuillage bicolore. «J’ai aussi privilégié des fleurs pour les insectes comme les agastaches ou les échinacées.»
Les variétés se répètent d’un massif à l’autre pour amener de l’unité tout en changeant en fonction de l’exposition et de la lourdeur du terrain. Se succédant au fil de la saison, les floraisons rendent ce splendide jardin expressif jusqu’à l’automne.
2
Confort pluriel
Julien Kellenberger, du bureau de paysagisme Mise en scène à Yens (VD), a dessiné un jardin à Estavayer-le-Lac(FR) qui fait le lien entre la maison contemporaine orthogonale située sur les hauteurs de la localité et la forêt qui la sépare du lac. «Avec le climat et l’humidité ambiante, le jardin est vite devenu luxuriant et la limite avec la forêt n’est plus si évidente», détaille-t-il.
Les propriétaires, un maraîcher, une praticienne en médecine alternative et leurs enfants, se réjouissent d’ailleurs d’accueillir une famille de renards ou des couleuvres dans leur bassin. Orienté au nord face au lac, le jardin se compose de végétaux peu exigeants en lumière comme des fougères ou des hellébores. Pour cette famille nombreuse, le paysagiste a imaginé diverses zones qui sont autant de lieux de vie, un espace «famille» au centre, une terrasse qui semble flotter sur l’eau ou encore cette «serregola», mélange de serre et de pergola, sorte de boudoir immergé dans la végétation.
L’ensemble se veut graphique et équilibré, «comme un tableau» à admirer depuis l’étage de la maison ou à partir des multiples points de vue diagonaux que le paysagiste a suggéré directement dans cet environnement riche en aménagements pour ces 1800m2.
3
Générosité rustique
Catherine et Luc Merian ont racheté la superbe ferme du Redon à Avry-devant-Pont (FR), au bord du lac de Gruyère en 2006. À ce moment-là, la vénérable bâtisse en bois de 1703, inhabitée depuis un demi-
siècle, était ouverte aux quatre vents et du petit bétail y avait même élu domicile. Le couple à la tête du bureau d’architecture du paysage B.A.P. Merian l’a retapée en suivant les recommandations du Service des biens culturels. Les travaux se sont terminés en 2015 à la suite desquels ceux du jardin ont été réalisés. Cet espace extérieur enchanteur sert de carte de visite à ces professionnels dont les bureaux occupent l’ancienne ferme. Il respecte également l’esprit historique de la maison avec son dessin composé de carrés disposés en croix typique des jardins géométriques du Moyen Âge. Des vivaces aux fleurs pastel comme des sauges et des géraniums sauvages, ainsi que des fougères et des graminées occupent ces carrés et créent des espaces privatifs.
Des platanes parasols offrent de l’ombre au coin terrasse face au lac. Le terrain a été remodelé pour créer des paliers qui épousent la pente. En haut, à proximité de la maison, on trouve le potager installé dans des bacs en bois surélevés. «Nous nous sommes inspirés d’un livre de Stéphane Krebs qui détaillait les éléments typiques des jardins paysans suisses», explique Luc Merian. Un jardin historique et diversifié avec ses vieux poiriers, son verger haute tige que les nouveaux habitants ont planté de l’autre côté de la maison, ses ruches et sa noue où les oiseaux peuvent venir se désaltérer.
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