Vignes et oliviers vivent en symbiose sur le toit de sa maison enterrée

Alessio Giorgerini a fait de son étonnante villa un havre de nature, aux Évouettes (VS). Grâce à un savant système d'arrosage et de protection contre le gel, cet ingénieur cultive son arbre préféré et produit de l'huile d'olive.
4 novembre 2024 Lila Erard
Alessio Giorgerini a réussi à faire pousser de la vigne dans 30 cm de terre, sur son toit en pente. Plus d'une centaine d'oliviers ont aussi été plantés sur la parcelle, principalement côté sud à l'abri de la bise noire.
© Mathieu Rod
Alessio Giorgerini a réussi à faire pousser de la vigne dans 30 cm de terre, sur son toit en pente. Plus d'une centaine d'oliviers ont aussi été plantés sur la parcelle, principalement côté sud à l'abri de la bise noire.
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Alessio Giorgerini a réussi à faire pousser de la vigne dans 30 cm de terre, sur son toit en pente. Plus d'une centaine d'oliviers ont aussi été plantés sur la parcelle, principalement côté sud à l'abri de la bise noire.
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Alessio Giorgerini a réussi à faire pousser de la vigne dans 30 cm de terre, sur son toit en pente. Plus d'une centaine d'oliviers ont aussi été plantés sur la parcelle, principalement côté sud à l'abri de la bise noire.
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Alessio Giorgerini a réussi à faire pousser de la vigne dans 30 cm de terre, sur son toit en pente. Plus d'une centaine d'oliviers ont aussi été plantés sur la parcelle, principalement côté sud à l'abri de la bise noire.
© Mathieu Rod

Depuis la route, on croirait apercevoir une colline toscane, gorgée de fruits ensoleillés et de pittoresques sentiers. Pourtant, il s’agit du toit de la maison d’Alessio Giorgerini, qu’il a recouvert d’une couche de terre pour donner vie à son rêve le plus fou.

Il y a près de quinze ans, cet Italien tombé amoureux du Valais a construit de ses mains un lieu de vie pour sa famille et un havre de paix pour les plantes et les animaux, aux Évouettes. «Je me sens en décalage avec le monde actuel, où les humains évoluent au détriment de leur environnement. Je veux apporter ma contribution et laisser de belles choses à mes enfants. Pas besoin d’acheter de la nourriture à l’étranger, elle pousse au-dessus de ma tête!» s’exclame-t-il.

De la vigne en toiture

En creusant la parcelle pour bâtir sous terre une partie du logement, ce grand bricoleur a pu installer une toiture végétalisée en pente, accessible à pied. Plusieurs centaines de plants de vigne des cépages résistants divico et divona s’y épanouissent dans une fine couche de terre.

«Les végétaux sont intelligents et s’adaptent à toutes les situations. Ici, il n’y a aucun espace perdu. En revanche, j’ai choisi de ne pas vendanger cet automne en raison du gel survenu au début d’année. Les quantités de raisin sont trop faibles, je les laisse aux oiseaux.» En temps normal, ce bon vivant confectionne son propre vin ou le fait vinifier.

Entre les parchets, à côté des velux donnant sur les chambres à coucher, des courges sont prêtes à être récoltées. «Leurs larges feuilles protègent le sol et empêchent l’évaporation. Pourquoi avoir un logement stérile quand il peut être source de vie?» questionne-t-il en continuant la visite.

En chiffres

2000 m 2 de terrain.

104 oliviers de 7 variétés.

20 litres d’huile d’olive par année environ.

400 plants de vigne.

300 bouteilles de vin par année.

30 cm de terre sur le toit.

14 m 3 d’eau de pluie stockée.

Frantoio, leccino et pendolino

Véritable mascotte des lieux, une autre plante occupe l’espace sur et autour de la bâtisse: l’olivier, «un symbole de fertilité et d’amitié qui accompagne l’humanité depuis la nuit des temps». «J’ai grandi avec et je continue à le faire», déclare-t-il en se déplaçant du côté sud de la maison.

C’est ici, proche de la paroi, que ces petits protégés – âgés de 3 à 200 ans – se plaisent le plus, à l’abri de la bise noire. Parmi les variétés, on retrouve frantoio, la plus délicate, leccino, qui résiste au froid, et pendolino, au pouvoir pollinisateur. «Elle, je la mets plutôt au nord, pour que le vent transporte son pollen vers ses collègues», explique cet autodidacte, qui apprend en observant.

À la faveur du réchauffement

Une fois mis en terre au printemps, les arbres méditerranéens ont été entourés d’un cadre de bois au sol retenant l’humidité et la chaleur. «Je suis un des premiers de la région à leur avoir fait passer l’hiver, affirme-t-il fièrement. Pour ce faire, je protège la base du tronc avec du compost constitué de feuilles mortes et de déchets verts que les gens du quartier m’apportent. Aujourd’hui, certains me demandent même de planter des oliviers chez eux», se réjouit-il en pointant plusieurs spécimens dans le jardin du voisin.

C’est que cette espèce se plaît de plus en plus sous nos latitudes en raison du réchauffement. Quant à la mouche de l’olive, ravageur qui détruit les récoltes en Italie, elle ne pose pas encore problème en Suisse.

«Ce végétal est très résistant. Regardez celui que j’ai planté en 2004. Il est mort deux fois, mais a toujours repoussé. Aujourd’hui, il a trois troncs et c’est l’un des plus productifs. J’admire cette résilience. L’olivier demande peu, mais donne beaucoup.»

Au goutte-à-goutte

Concernant l’arrosage, cet ingénieur hydraulique n’a rien laissé au hasard, en mettant en place un savant système de goutte-à-goutte fonctionnant à l’eau de pluie. Celle-ci est distribuée sur tout le terrain grâce à un labyrinthe discret de tuyaux noirs.

«Je la récupère sur le toit, que j’ai conçu avec une pente de 2%. Le liquide est stocké dans une cuve puis redistribué lorsque j’active le robinet. C’est simple. L’eau est ensuite de nouveau filtrée par le sol et drainée, avant d’être remise en circuit fermé sur le toit. Ainsi, elle se bonifie en nutriments au fil du temps», détaille l’homme aux mille idées.

Végétaliser notre habitat

Pour valoriser sa récolte, Alessio Giorgerini a adapté un vieux pressoir à raisin pour produire de l’huile à froid, dans un local au fond du jardin. «Je dois chauffer la pièce à au moins 20°C pour ouvrir les pores des olives», souligne-t-il en montrant la machine, puis en proposant une dégustation au salon. Surprise! Un pot de miel artisanal confectionné grâce aux ruches posées sur le toit est aussi ouvert sur la table.

«Vous verrez, il a un goût particulier, car il ne résulte que du butinage des oliviers, qui fleurissent juste avant les tilleuls et les châtaigniers», précise celui qui commence à vendre sa production à une maison d’hôte et à un restaurant du village. Le reste du temps, le Valaisan d’adoption profite de sa maison-jardin, dans laquelle vignes et oliviers sont visibles depuis toutes les fenêtres.

Chaque matin, avant d’aller au travail, il sort se promener durant une heure dans les dédales luxuriants de sa propriété, également appréciés des fouines, renards et merles. «Dans la nature, l’ordre, c’est le désordre. Je rêve d’un monde où tous les bâtiments seraient de grands écosystèmes verts. Nous devons retrouver une symbiose avec notre habitat.»

Le jardinier

D’origine toscane et sicilienne, et passionné par l’histoire des Vikings, Alessio Giorgerini aime dire qu’il a un caractère explosif, comme les montagnes. Les oliviers l’ont toujours accompagné depuis l’enfance. «Il y en avait partout dans le village où j’ai grandi. J’ai fait ma première greffe avec mon grand-père à six ans.» Après des études en électrotechnique, ce sportif intègre une école d’ingénieurs en environnement à Florence, puis fait un master à Barcelone, en parallèle du rugby qu’il pratique à haut niveau. Arrivé en Suisse en 2004 par amour, il est séduit par les vignes valaisannes. Depuis 2017, le quadragénaire est responsable des réseaux d’eau pour la commune de Montreux. Il vit aux Évouettes (VS) avec son épouse et leurs trois enfants.

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