Le paddock paradise mise sur le bien-être des chevaux

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Le paddock paradise mise sur le bien-être des chevaux

Originaire des États- Unis, ce concept suscite de plus en plus d’intérêt en Suisse romande. À l’invitation de l’Association pour la promotion des pratiques équestres alternatives, l’Anglaise Georgie Harrison est venue récemment présenter ce système de détention innovant.

Le paddock paradise mise sur le bien-être des chevaux

Depuis plusieurs années, un vent nouveau souffle sur la garde de chevaux. Les cavaliers et propriétaires d’écuries sont toujours plus nombreux à rechercher des alternatives à la détention traditionnelle en box. Car assurer le bien-être physique et mental des chevaux en répondant à leurs besoins naturels est désormais une préoccupation de plus en plus présente dans le milieu équestre. Ici et là, des stabulations libres ont ainsi fait leur apparition: les animaux y sont détenus en groupe, sur une structure qui leur offre abri et espace. Ces stabulations permettent aux chevaux d’avoir des contacts sociaux avec leurs congénères et de la liberté de mouvement en continu. Malgré tout, le système est encore perfectible. Car force est de constater que, en dépit de l’espace à leur disposition, les animaux restent souvent statiques. Une étude publiée par le Haras national suisse a permis de déterminer la moyenne des kilomètres parcourus dans une stabulation libre, qui varie entre 2,5 et 5 kilomètres selon sa structure. On est donc encore bien loin des 16 kilomètres effectués en moyenne à l’état sauvage par des équidés à la recherche constante d’eau et de nourriture.

Une vie plus naturelle
Le concept novateur du paddock paradise a été développé dans les années 2000 aux États-Unis par le maréchal-ferrant Jaime Jackson. «En observant les chevaux sauvages, il a constaté que les équidés se déplaçaient continuellement au pas, en ile indienne, sur des pistes qui relient les points d’eau aux pâturages, souligne l’Anglaise Georgie Harrison, une des diplômées de son école. Il a ensuite réfléchi à la manière la plus appropriée de créer un espace de vie le plus naturel possible.» Le paddock paradise repose sur trois grands principes: le mouvement, l’alimentation, la vie sociale. Si certains aspects du paddock paradise n’ont rien d’innovant par rapport à une stabulation libre classique, comme la vie en groupe et la mise à disposition de foin à volonté, la spécificité du système repose sur la volonté d’inciter les chevaux à se dé- placer. «Longtemps, on a sous-estimé l’importance du mouvement pour la bonne santé physique et psychique des chevaux», relève l’Anglaise.

Bouger continuellement
Pour atteindre cet objectif, Jaime Jackson a imaginé des pistes nommées «parcours». Plutôt que de laisser une pâture complètement ouverte, des cheminements artificiels d’une largeur moyenne de 4 mètres sont délimités par des clôtures électriques. Mais ces parcours, stabilisés avec des gravats ou en terre, ne sont pas encore suffisants pour encourager le déplacement chez les chevaux. Les points d’intérêt – eau, foin, abri- sont donc éloignés au maximum les uns des autres. Le mouvement n’est ici pas gratuit, mais a un but précis – boire, manger, se reposer, jouer – ce qui lui donne tout son sens. «Dans notre paddock paradise, en Angleterre, nous pouvons observer nos animaux se mouvoir à la queue leu leu, comme dans la nature, note Georgie Harrison. La synergie du groupe les incite à bouger beaucoup plus. Même une surface restreinte permet de mettre en place un tel système.» À noter que dans le concept du paddock paradise, les chevaux n’ont jamais accès à l’herbe, jugée trop riche. Nombre de cavaliers sont partants pour offrir un cadre de vie plus naturel à leurs animaux, mais ce système est-il compatible avec une utilisation sportive des chevaux? «Le paddock paradise n’est en aucun cas réservé uniquement aux chevaux de loisirs, aux poulains ou aux retraités, souligne l’Anglaise. Avec mes montures, je participe à des compétitions de concours complet et de dressage au niveau national.»

Texte(s): Véronique Curchod

L’avis

L’avis du professionnel

«Ce concept nécessite certains aménagements difficilement applicables en zone agricole»
«Le concept du paddock paradise me semble très intéressant, car il permet de satisfaire les besoins physiques et psychiques des chevaux, souligne Anja Zollinger, ingénieure agronome au Haras national suisse, à Avenches (VD). Cependant, j’émettrais quelques réserves sur certains points. Dans notre pays, les parcours non stabilisés deviennent rapidement boueux en hiver. Outre le risque de glissades, la probabilité que certains animaux développent des maladies telle la gale de boue me semble non négligeable. De plus, il n’est pas acceptable pour la majorité des professionnels et du grand public de voir des chevaux patauger dans la boue. Stabiliser ces parcours serait l’option idéale à mes yeux, mais on se heurte alors à la loi sur l’aménagement du territoire, qui n’autorise pas cette pratique en zone agricole. Du point de vue écologique et agronomique, je trouve aberrant de faucher l’herbe pour la donner uniquement sous forme de foin, alors que les chevaux pourraient la brouter. Cependant, cela se justifie pour certains animaux sujets au surpoids et/ou à la fourbure.»

L’avis de l’utilisateur

«Nous sommes d’autant plus satisfaits que note clientèle a été séduite par le paddock paradise»
À Moiry (VD), Simon Crisinel et Carmen Loewensberg ont créé un paddock paradise voilà moins d’une année. «Nous voulions mettre en place une structure de pension sur le domaine familial, explique le couple. Nous avons fait un sondage sur les réseaux sociaux, afin de mieux connaître les attentes des propriétaires de chevaux. Certains ont évoqué le paddock paradise. Nous nous sommes alors documentés et avons été séduits par ce concept.» Désormais, ce sont neuf chevaux qui vivent sur cette nouvelle structure constituée de parcours qui relient un grand abri paillé à des râteliers à foin et à des points d’eau. Le succès a été fulgurant. «Nous avons même dû refuser des demandes.» Après quelques mois, le bilan est positif. «Notre clientèle est très satisfaite. La seule contrainte pour les propriétaires est de devoir parfois aller chercher leur cheval à l’autre bout du paddock paradise. De notre côté, nous sommes heureux de pouvoir offrir à ces chevaux une vie plus naturelle. L’entretien de la structure demande du temps, mais nous avons plus de flexibilité qu’avec une détention en boxes.»

Plus d'infos

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Association pour la promotion des pratiques équestres alternatives (APPEA), Rebecca Jeanson, tél. 078 644 07 94,