Point fort
Les lutteuses ont droit à une vraie fête pour désigner leur reine

Organisée le 2 septembre à Grächen (VS), la Fédérale féminine inaugure un nouveau format en 2023. Un peu moins d’une trentaine d’athlètes s’affronteront dans la sciure pour tenter de remporter le titre suprême.

Les lutteuses ont droit à une vraie fête pour désigner leur reine

La commune haut-valaisanne de Grächen accueillera la 31e édition de la Fête fédérale de lutte suisse féminine. Attendue le samedi 2 septembre prochain, la compétition se déroulera sur la Hannigalp, en altitude, alors que la proclamation des résultats se fera au centre du village. Contrairement aux hommes, dont l’événement est organisé tous les trois ans, la Fédérale féminine a lieu chaque année. Et elle innovera en 2023 avec un nouveau règlement. «Jusqu’ici, la reine était désignée en fonction des points obtenus durant la saison, ce qui laissait souvent peu de place au suspense. Dorénavant, c’est la meilleure lutteuse à l’issue des six passes de la journée qui remportera le titre suprême, comme chez les garçons. Cela sera une vraie fête, avec un véritable enjeu au bout», explique Thomas Mollet, chef technique de la Fédération de lutte suisse féminine.

Une relève bien présente
Un changement qui a également pour but de s’adapter au règlement en vigueur chez les hommes. «Des discussions ont lieu pour rapprocher les associations masculine et féminine, cette harmonisation va dans ce sens-là», poursuit Thomas Mollet, qui espère une meilleure visibilité de la discipline à l’avenir. Car la compétition n’a encore rien à voir avec celle des garçons, tant en matière de spectateurs que de budget – estimé aux alentours de 50’000francs à Grächen, contre… 42 millions de francs pour la dernière Fédérale à Pratteln (BL).

Seule concurrente romande en l’absence de la Vaudoise Diana Fankhauser, tenante du titre, et de la Fribourgeoise Brigitte Foulk, toutes deux blessées, Mélissa Suchet tentera sa chance parmi les 26 athlètes sélectionnées, dont les Bernoises Jasmin Gäumann et Melissa Klossner, ainsi que la Lucernoise Isabel Egli, trois sérieuses prétendantes à la victoire (lire les encadrés).

Les hommes sont environ 6000 en Suisse à revêtir la culotte, actifs et jeunes confondus. Fondée en 1992, l’Association fédérale de lutte suisse féminine compte un peu plus de 200 adhérentes en tout, dont seule une quarantaine figure parmi les actives. «Près des trois quarts sont des jeunes. La relève est donc bien là, y compris du côté romand, où les filles représentent un tiers des effectifs. La lutte féminine prendra de l’ampleur ces prochaines années, c’est certain», se réjouit Thomas Mollet.

+ d’infos www.arlsf.ch

Texte(s): Aurélie Jaquet
Photo(s): EFSV/DR

Les favorites

Mélissa Suchet, 18 ans, Grandvillard (FR)
Club des lutteurs du Pays-d’Enhaut
Couronnée fédérale en 2022, la Gruérienne se rendra à Grächen (VS) avec l’ambition de réitérer sa prestation. «J’espère terminer dans le haut du classement. Devenir reine serait un rêve, mais j’ai encore du chemin à faire, même si cette saison, j’ai réussi à battre des adversaires que je n’arrivais pas à dominer jusque-là», confie Mélissa Suchet en souriant. Un parcours déjà remarquable pour la jeune athlète, qui a commencé la lutte sur un coup de tête il y a six ans seulement. «J’accompagnais mes frères à une fête à Rarogne (VS). Les filles s’affrontaient le samedi. Je me suis inscrite et j’ai croché.» Depuis, elle s’entraîne deux fois par semaine à côté de son emploi d’assistante en pharmacie et a fait de beaux résultats cette année, remportant trois couronnes et une belle 5e place (sur 27 concurrentes) à la Fête romande de Romanel-sur-Lausanne (VD) en juillet. Son souhait: inciter les jeunes femmes à revêtir la culotte afin d’offrir une meilleure visibilité à la discipline et ainsi voir davantage de fêtes organisées à l’avenir.


Jasmin Gäumann, 23 ans, Häutligen (BE)
Club de lutte de Zäziwil
La lutteuse bernoise sera incontestablement l’athlète à suivre de près le 2 septembre prochain. Elle a terminé deux fois à la 2e place du classement annuel, a remporté 26 couronnes et signé trois victoires rien que cette saison (sur huit fêtes), dont une au lac des Joncs (FR) fin juillet. Mordue de sciure depuis sa plus tendre enfance, Jasmin Gäumann a commencé à l’âge de 8 ans, inspirée elle aussi par ses deux frères formés au club de Zäziwil. Ses atouts: sa force physique et son expérience, mais surtout son tempérament fédérateur. «J’essaie toujours de motiver l’équipe, même si la lutte est une discipline individuelle.» En plus de ses propres entraînements, elle s’occupe d’ailleurs de former les jeunes de son club. Son point faible: l’endurance, un aspect sur lequel la Bernoise dit vouloir encore progresser ces prochains temps. À côté de ses divers engagements dans le monde de la lutte, cette employée de bureau qui travaille dans une grande entreprise de commerce de bétail est également arbitre de hornuss et pratique l’équitation.


Isabel Egli, 26 ans, Menzberg (LU)
Club de lutte de Steinhuserberg
La Lucernoise n’avait que 5 ans lorsqu’elle a commencé à lutter. «J’ai été initiée par mon père, mon oncle, ma mère et mes tantes. L’une d’elles, Brigitte Kunz, a été sacrée reine à cinq reprises et a remporté plus de 60 couronnes au cours de sa carrière. Elle nous a toujours emmenées, ma sœur et moi, à toutes les fêtes», explique Isabel Egli, dont les quatre frères luttent également. Une véritable histoire de famille, donc, et un talent qui s’est transmis au fil des générations, puisque la Lucernoise a été désignée deux fois reine dans la catégorie des jeunes lutteuses. Cette saison, elle a remporté deux fêtes: l’une à Huttwil (BE) en avril et l’autre à Romanel-sur-Lausanne (VD) en juillet. Issue d’une famille d’agriculteurs, Isabel Egli donne encore souvent des coups de main au domaine, à côté de son métier d’infirmière spécialisée et de formatrice professionnelle. Férue de sport, surtout de randonnée et de ski, elle possède un caractère de battante et affirme que sa principale faiblesse, dans un rond de sciure, est de ne pas réussir à terrasser toutes ses adversaires.


Melissa Klossner, 23 ans, Diemtigen (BE)
Club des Bernoises
Avec douze couronnes à son actif et sa belle deuxième place à la Fête fédérale l’année dernière, où elle termina juste derrière la reine Diana Fankhauser, la jeune Bernoise figure parmi les athlètes qui montent. Il faut dire que, dans la famille Klossner, la lutte est omniprésente. «Tout le monde en fait à la maison. Mon père, mon oncle, mes cousins, mes trois frères. Même ma mère et ma tante ont revêtu la culotte.» Une voie toute tracée pour cette fille d’agriculteurs qui a fait ses débuts chez les jeunes en 2015. Peintre de formation, la Bernoise travaille dans une entreprise de plâtrerie et d’échafaudages. Un job éprouvant qui la dispense d’entraînement physique. «J’en fais déjà tous les jours sur les chantiers», plaisante Melissa Klossner, qui peaufine sa technique environ quatre heures par semaine. Sa force? Des prises qu’elle décrit comme «spéciales et pas forcément très académiques», mais qui semblent avoir fait leurs preuves, à en croire son palmarès florissant. Son point faible: «J’ai tendance à me mettre trop de pression. Cela m’a coûté certaines victoires.»