Au Domaine de la Mermière, on laisse faire la nature pour en tirer le meilleur

Chaque mois, Terre&Nature met la relève à l'honneur. À Soral (GE), Justine Batardon a repris le domaine viticole bio de son père et poursuit son approche peu interventionniste, à la vigne comme à la cave.
12 novembre 2024 Aurélie Jaquet
À 28 ans, Justine Batardon a succédé à son père à la tête du Domaine de la Mermière. Elle s'occupe de la vinification et de la commercialisation des vins, alors que son frère Christophe est responsable de la production végétale de l'exploitation.
© Fabien Scotti
À 28 ans, Justine Batardon a succédé à son père à la tête du Domaine de la Mermière. Elle s'occupe de la vinification et de la commercialisation des vins, alors que son frère Christophe est responsable de la production végétale de l'exploitation.
© Fabien Scotti
À 28 ans, Justine Batardon a succédé à son père à la tête du Domaine de la Mermière. Elle s'occupe de la vinification et de la commercialisation des vins, alors que son frère Christophe est responsable de la production végétale de l'exploitation.
© Fabien Scotti
À 28 ans, Justine Batardon a succédé à son père à la tête du Domaine de la Mermière. Elle s'occupe de la vinification et de la commercialisation des vins, alors que son frère Christophe est responsable de la production végétale de l'exploitation.
© Fabien Scotti

Les prévisions météo annonçaient du soleil, mais le village de Soral est plongé dans un épais brouillard en cette matinée d’octobre. «Il y a souvent de la brume à cette saison, elle se dissipe cependant au fil de la journée», lâche Justine Batardon avec entrain en traversant la cour.

La viticultrice de 28 ans, à l’énergie communicative, reçoit après les vendanges. Ses deuxièmes à la tête de l’exploitation familiale. Il y a quelques mois, elle a repris au côté de son frère Christophe le Domaine de la Mermière, dans la campagne genevoise.

De l’agroforesterie

«Notre père Yves nous a passé le témoin le printemps dernier, lorsqu’il a pris sa retraite. Lui-même avait hérité de l’exploitation de sa famille. Il y a travaillé pendant plus de trente ans et l’a beaucoup développée au fil du temps, en rachetant de nouvelles parcelles et en mettant l’accent sur la vigne, qui n’était que secondaire à ses débuts», raconte Justine Batardon.

Aujourd’hui, le Domaine de la Mermière repose avant tout sur la viticulture, son activité principale. Il compte également plusieurs hectares de grandes cultures, où la famille fait pousser blé, orge, colza, tournesol, pois ou encore féverole. «Mon frère s’occupe de la production végétale, moi de la vinification et de la commercialisation des vins, même si nous nous donnons des coups de main mutuellement», explique la jeune femme.

Ensemble, ils travaillent 11 hectares de vignes. Il y a quelques années, Christophe a mis en place de l’agroforesterie au sein
de l’exploitation, dans les champs et dans les vignes. De part et d’autre des rangées, 
il a planté des aronias, des amandiers et 
des pêchers.

Des roses pour égayer les vignes

Dans les prairies, les Batardon ont installé des mares qui abritent de 
nombreux batraciens utiles pour lutter contre certains envahisseurs des grandes cultures. «Cela nous permet d’une part de favoriser la biodiversité, mais aussi d’embellir le paysage. Dans la famille, on aime travailler dans un environnement qui soit beau et accueillant. On a d’ailleurs planté des rosiers au bout de nos rangées de vignes qui ne servent à rien d’autre qu’à apporter de la couleur l’été», confie la Genevoise.

Depuis plus d’une quinzaine d’années, le Domaine de la Mermière est ainsi cultivé au plus près de la nature et sans produits chimiques de synthèse. «Mon père, qui n’est pas un adepte des labels, n’avait jamais demandé de certification. Avec mon frère, nous avons entrepris les démarches il y a quelques années et l’exploitation est certifiée bio depuis 2019», raconte la viticultrice.

Souvent sans soufre

Ils poursuivent ensemble la philosophie de leur père, fervent défenseur d’une agriculture paysanne et écologique. «Nous travaillons nos sols mécaniquement. Au printemps, on les nourrit avec des préparations à base de compost, d’algues et de plantes. Actuellement, c’est la période de l’arrachage des rumex, que nous effectuons à la main à l’aide d’une triandine. Nous essayons de respecter le plus possible les cycles de la nature afin de permettre à la vigne de se réguler toute seule et de trouver son propre équilibre.»

Une approche qui permet à la famille Batardon de limiter également ses interventions à la cave. «On laisse à nos vins le temps de s’exprimer. Une partie d’entre eux sont produits sans soufre et rencontrent un joli succès.»

Leurs chasselas, pinot noir, gamay, merlot, gamaret et nombreux assemblages trouvent preneurs auprès de différents restaurateurs et magasins bios de la région ainsi qu’en vente directe au domaine. Les bouteilles sont consignées afin d’être retournées en vue de leur lavage et réutilisation, tout comme les cartons, qui servent plusieurs fois.

Un test concluant

Passionnée par son métier, Justine Batardon ne se destinait pourtant pas à reprendre le flambeau du domaine familial. «Comme beaucoup d’enfants du milieu, j’ai passé mes étés à travailler à la vigne et j’avais 
envie d’autre chose. Après l’école, j’ai choisi d’apprendre le métier de pépiniériste. 
Après mon apprentissage, j’ai pris une année sabbatique et je suis partie voyager en 
Nouvelle-Zélande, en Australie et en Asie. À mon retour à l’âge de 19 ans, je n’avais qu’une envie: trouver un travail, mettre de l’argent de côté et repartir», se souvient-
elle.

Mais un soir, alors que Justine Batardon se balade le long du Rhône avec son père et lui faire part de sa recherche d’emploi, il lui propose de venir travailler au domaine. «Il m’a dit que je pouvais tout arrêter si cela ne me plaisait pas. J’ai bossé un an et j’ai adoré ça.» La Genevoise entreprend un CFC en viticulture, puis enchaîne avec Changins, où elle se perfectionne en œnologie.

Revenus complémentaires

À côté de leur activité au sein du domaine, Justine Batardon et son frère travaillent tous les deux à l’extérieur. Lui comme commissaire d’apprentis, elle à 20% comme inspectrice chez Bio Inspecta.

Ces activités secondaires leur permettent de compléter leurs revenus issus de l’exploitation, qui ne suffit pas, pour l’instant, à faire vivre deux personnes en plus de l’employé à temps partiel qui œuvre au sein du domaine depuis vingt-cinq ans.

Mais pour l’heure, c’est la cave qui attend Justine Batardon, avec la fin des vinifications et la mise en barriques des vins. Le deuxième millésime à son nom.

En chiffres

11 hectares de vignes et 38 hectares de grandes cultures et prairies composent le domaine.

3000 arbustes et 300 arbres fruitiers hautes tiges dans les champs, ainsi que 
36 pêchers et 30 amandiers sur les parcelles viticoles ont été plantés par la famille Batardon depuis 2021.

15 cépages et 19 vins différents.

Depuis 2012, une partie des vins sont élaborés sans soufre.

55 000 bouteilles sont produites en moyenne chaque année.

+ d’infos www.mermiere.ch

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