Espèce «parapluie», le petit-duc scops est le seul hibou migrateur du pays

Le rapace, qui s'apprête à s'envoler pour rejoindre ses quartiers d'hiver en Afrique, a failli s'éteindre dans les années 2000. Heureusement, des mesures ont pu être prises pour permettre à l'oiseau de se maintenir.
18 août 2024 Chloé Pang
La «pioute», comme on nomme le petit-duc scops en Valais, aime le climat chaud. Dès la mi-août, l'oiseau prend le chemin de l'Afrique où il trouvera de la nourriture pour l'hiver.
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Il est vraiment unique, le scops: drôle de nom, pour commencer! Si on comprend bien son rang dans la hiérarchie des rapaces nocturnes – le duc étant le deuxième titre le plus élevé après le prince –, son patronyme vient du grec skôps, qui signifie scruter, regarder avec attention.

La vue est en effet un sens particulièrement important chez les rapaces nocturnes. Leurs yeux sont orientés vers l’avant, ce qui leur confère une vue binoculaire très précise, et ils laissent entrer plus de lumière, leur permettant de chasser de nuit. Combinée à leur ouïe surdéveloppée, la vue des hiboux et chouettes fait de ces oiseaux des prédateurs hors pair.

L’original de la lignée

Outre son nom bizarre, le petit-duc scops cumule les particularités: il est notre plus petit hibou à aigrettes. Avec une vingtaine de centimètres de hauteur, une envergure de 53 à 63 cm et un poids plume de 75 à 95 g, ses mensurations contrastent de manière presque comique avec celles du cousin grand-duc: de 60 à 75 cm de hauteur, de 160 à 188 cm d’envergure et de 1,5 à 3 kg! Autre caractéristique unique à l’échelle de la Suisse: le petit-duc est notre seul hibou migrateur.

Dès la mi-août, il se met en chemin pour l’Afrique, où il passera l’hiver au-delà du Sahara. Comme les autres oiseaux migrateurs, cette stratégie d’adaptation est due non pas aux températures, mais à la disponibilité en nourriture: le petit-duc scops chasse les gros insectes, notamment les sauterelles, les grands coléoptères, les papillons, les cigales et d’autres invertébrés. Des denrées introuvables en Suisse en hiver.

Valaisan pure souche

Pour dégoter cette nourriture pendant la saison de nidification, le petit-duc scops habite chez nous dans les cultures traditionnelles en terrasse avec une structure bocagère, les prés richement structurés avec de vieux arbres à cavité, et les vergers hautes tiges. Comme l’espèce est essentiellement méditerranéenne, la Suisse constituant la limite septentrionale de son aire de répartition, elle aime le climat chaud et trouve donc en Valais son habitat de prédilection.

Autrefois, l’espèce y était très répandue, et on pouvait même entendre la «pioute» (son nom en patois) dans des parcs publics à Sion ou à Sierre. Hélas, ses effectifs ont chuté dès les années 1950, et l’oiseau se trouve aujourd’hui sur la liste rouge des espèces menacées.

Multiples bénéfices

Comme beaucoup d’autres espèces menacées, c’est la perte de son habitat qui a porté préjudice au petit hibou. De nombreux arbres à cavités, vergers hautes tiges et prairies extensives ont disparu au profit de zones agricoles intensives, de surfaces boisées ou de zones résidentielles.

Le petit-duc scops étant un volatile qualifié d’exigeant en matière d’habitat – les surfaces qu’il utilise doivent remplir des caractéristiques précises –, prendre des mesures en sa faveur bénéficie à une multitude d’autres espèces animales ou végétales: c’est ce qu’on appelle une espèce «parapluie».

Ainsi, comprendre les besoins du petit-duc est au centre des préoccupations de la Station ornithologique suisse, qui mène un suivi des effectifs et des travaux de recherche ciblés.

Retour gagnant

Grâce aux données récoltées, l’antenne valaisanne de la Station ornithologique suisse peut définir quelles sont les zones prioritaires à protéger, ou quels sont les sites à revaloriser. Les mesures prises vont de la plantation de vergers hautes tiges à la réhabilitation de parcelles, en passant par la préservation de ce qui existe déjà.

Des actions qui portent déjà leurs fruits: en effet, le petit-duc a déjoué les pronostics qui le donnait comme éteint en territoire helvétique à la fin du siècle passé, et ses effectifs progressent de nouveau. Puisse le «kiou» retentir à nouveau abondamment sous nos latitudes!

+ d’infos Dans le cadre d’un partenariat, Terre&Nature a proposé à la Station ornithologique suisse, qui fête ses 100 ans cette année, de mettre en avant une série d’oiseaux indigènes.

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