La discrète salamandre noire ne craint nullement de se faire doucher

Actif de mai à septembre, le batracien apprécie les milieux humides essentiellement préalpins. 
Les jours de pluie sont une opportunité d'apercevoir cette espèce surtout nocturne.
25 août 2024 Daniel Aubort
La salamandre noire est aisément reconnaissable. Son corps, d'une longueur de 10 à 15 cm, est marqué de sillons costaux circulaires. L'animal, essentiellement nocturne, se montre toutefois les jours pluvieux d'été.
© Daniel Aubort

Véritables vestiges du passé, les urodèles, dont fait partie la salamandre noire, sont les premiers vertébrés à être sortis de l’eau pour coloniser les terres. Cet ordre d’amphibiens comprend les tritons et les salamandridés dont la Suisse compte deux représentants: la salamandre tachetée, bien connue du grand public, et sa cousine, la salamandre noire.

«Cette dernière est entièrement noire avec une peau luisante et sans le moindre motif, ce qui est unique, explique Flavio Zanini, directeur du bureau Drosera écologie appliquée SA, à Sion (VS), et spécialiste des batraciens. Elle est plus petite que la salamandre tachetée et se rencontre hors des plans d’eau. À l’état sauvage, elle vit entre dix et quinze ans.» Son corps est marqué de sillons costaux circulaires et sa taille varie de 10 à 15 cm au maximum.

Repaires en altitude

Bien qu’elle prenne souvent le large afin de se cacher à l’arrivée d’un marcheur, la salamandre noire se laisse observer de près lors d’approches précautionneuses sans mouvements brusques. Vue de près, dressée en appui sur ses pattes antérieures, elle prend un petit air d’animal préhistorique.

Présente à partir de 400 mètres d’altitude, c’est surtout entre 800 et 1300 mètres que l’espèce trouve son habitat le plus favorable dans notre pays, particulièrement dans les régions à roche calcaire. «Elle vit essentiellement dans les forêts de montagnes humides et moussues, les pessières et les hêtraies, mais aussi dans les pâturages d’altitude pas trop secs et les landes éparses, précise le scientifique. En Valais, on la trouve parfois dans le mélézin.»

Fan des escargots

Ce batracien passe la plus grande partie de sa vie caché. «Il choisit l’abri de grosses pierres, de troncs, de racines et de fentes dans la roche», énumère Flavio Zanini. 
Active généralement de mai à septembre, 
la salamandre noire a des besoins météorologiques bien précis.

«Des études ont montré que son activité commence à une température supérieure à 4°C, l’humidité relative doit atteindre au moins 85% et il faut que le rayonnement solaire direct soit absent.» Sa faible mobilité contraint l’espèce à se rabattre sur des proies lentes et faciles à saisir.

Son régime alimentaire est semblable en cela à celui de sa cousine tachetée. Elle est carnivore et se nourrit de divers petits invertébrés comme les escargots, les araignées, les vers, les insectes et leurs larves. L’animal hiberne dans des cavités.

Des années de gestation

Les jours pluvieux offrent parfois la chance d’assister à sa reproduction. Les approches du mâle sont assez décidées, mais ne sont pas forcément acceptées d’emblée par la femelle. «L’accouplement a lieu sur terre ferme. Le mâle se glisse sous la femelle et entoure les pattes antérieures de celle-ci avec les siennes.

Il dépose ensuite un paquet de sperme sur le sol et détourne son arrière-train de manière à ce que la femelle touche le sperme avec son cloaque, détaille Flavio Zanini. En règle générale, seuls deux des quelque 40 ou 50 œufs produits sont fécondés et se développent.» La femelle met bas des jeunes parfaitement formés (cas unique pour les batraciens de Suisse), indépendants dès leur naissance, après une très longue gestation de deux à trois ans!

Effectifs méconnus

Par ses mœurs discrètes et le fait de vivre en milieu essentiellement préalpin, bien des choses sont encore à découvrir sur 
la salamandre noire. Notamment d’éventuelles populations non répertoriées. Il est donc difficile de faire une estimation précise de la densité des effectifs.

«L’espèce est considérée comme non menacée sur la liste rouge de 2023. Mais dans les régions où sa présence est avérée, des restrictions sont prises lors de coupes forestières ou de modifications du relief, relève le spécialiste. Des mesures de sensibilisation sont aussi mises en place sur les axes routiers afin de limiter les risques d’écrasement.»

Le changement climatique est un danger. Il pourrait mener à l’assèchement encore plus prononcé de certains biotopes déjà à la limite de la tolérance hygrométrique de l’espèce.

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