Le Tinder des montagnes a déjà séduit des centaines de célibataires
Il y a Victoria, 27 ans, «toujours partante pour une rando ou un apéro». Et Malik, «un beau gosse prêt à escalader n’importe quelle montagne pour sa future chérie». Mais aussi Manu, 62 ans, «indépendant, retraité et disponible». Ou encore ces deux amies venues incognito écrire un mot «pour caser une de leurs copines».
Quelques messages parmi des centaines d’autres griffonnés à la hâte dans des petits carnets rouges aux pages gondolées par le grand air. Des calepins déposés sur plusieurs sommets fribourgeois à l’attention des randonneurs solitaires désireux d’y laisser un mot et leurs coordonnées dans l’espoir de trouver l’amour, là-haut sur la montagne.
Un premier message en forme de déclic
Créé au printemps 2024 par Thibaud Monney, un jeune Fribourgeois de 29 ans lassé des sites de rencontres en ligne, le Tinder des montagnes – détournement de la fameuse application pour célibataires – connaît un succès inattendu. «En moins d’une année, près de 400 personnes ont rédigé des messages et plusieurs couples se sont déjà formés», se réjouit le principal intéressé. Un engouement que le Fribourgeois était loin d’imaginer en démarrant son projet.
Un premier rendez-vous
en altitude, c’est cool,
ça change d’un bar,
c’est plus romantique.
Tout a commencé un dimanche soir lors d’une randonnée en solitaire dans les Préalpes fribourgeoises. Arrivé au sommet, Thibaud Monney rédige ces quelques lignes: «Montée de la Dent-de-Broc tout seul pour le coucher de soleil. La prochaine fois, on sera deux.» Il ajoute son numéro, replace le livre d’or dans sa boîte et rentre chez lui.
Le lendemain, une jeune femme le contacte. «Nous nous sommes vus quelques fois sans que cela aboutisse à une histoire d’amour, mais cette expérience m’a donné l’idée de créer ces carnets de rencontres», témoigne ce menuisier reconverti depuis six ans comme maître socioprofessionnel dans une institution pour personnes handicapées.
Calepins cachés dans les croix
Quelque temps plus tard, il parle de son concept à ses collègues lors d’une pause-café au travail. Emballés par le projet, ceux-ci le mettent au défi de le concrétiser. Les croix érigées sur les sommets constituent des cachettes toutes trouvées pour abriter ses carnets.
En mars 2024, Thibaud Monney installe les deux premiers au Vanil-du-Van et aux Merlas. Puis d’autres dans le courant de l’été à la Wandflue et à la Dent-de-Broc, à la Vudalla, à Teysachaux et au Vanil-de-l’Ecri. «Des sites avec du passage sans être trop fréquentés non plus. J’ai par exemple renoncé au Moléson, qui est accessible en cabine et draine énormément de touristes», précise le Fribourgeois.
Coup de foudre à la Wandflue
Parce qu’à l’origine de ces petits calepins, il y a d’abord l’envie de réunir des amoureux de montagne et de randonnée. «Le fait de s’être baladé sur le même sentier constitue un premier point commun et permet souvent d’amorcer la conversation. C’est l’avantage par rapport à un site de rencontres en ligne, où chacun raconte un peu ce que l’autre veut entendre. Et puis un premier rendez-vous en altitude, c’est cool, ça change d’un bar, c’est plus romantique», confie en souriant le Fribourgeois, que ses amis surnomment désormais le «Cupidon des montagnes».
En moins d’une année, son initiative a donné vie à de jolies histoires. Comme celle de ce couple âgé d’une cinquantaine d’années formé il y a quelques mois à la Wandflue. «Tous les deux m’ont écrit pour me remercier d’avoir rendu leur histoire possible et m’ont confié avoir célébré leur réveillon au Chalet du Soldat, pour être proches du carnet de leur rencontre.»
Il y a aussi ceux qui se réjouissent d’un premier rendez-vous, d’autres à qui ces calepins ont permis de nouer de nouvelles amitiés autour de la montagne ou qui s’enthousiasment simplement de la démarche. «J’ai même reçu un article paru dans la presse argentine d’une dame qui souhaitait créer un Tinder des montagnes là-bas, c’est fou», s’amuse Thibaud Monney.
Jusqu’à 2969 m d’altitude
En Suisse, le projet a également séduit dans d’autres cantons. On trouve désormais des carnets rouges sur certains sommets de Suisse centrale ainsi qu’en Valais et dans les Alpes vaudoises. «Quand j’ai découvert l’initiative de Thibaud, j’ai eu envie de faire la même chose ici. Je l’ai contacté pour connaître son avis et lui demander conseil et je me suis lancée», explique Valérie Antonelli, 51 ans, de Collombey (VS).
En novembre dernier, la Valaisanne a installé un premier carnet à la Pointe-de-Bellevue, au-dessus de Morgins (VS), suivi d’une dizaine d’autres, au Refuge des Dents-du-Midi, à la Pointe-des-Mossettes et au Mont-de-l’Arpille, en passant par le Mont-d’Or et la Croix-des-Chaux, dans les Alpes vaudoises. Après la fonte des neiges, Valérie Antonelli prévoit d’ajouter à son réseau deux sommets destinés aux randonneurs aguerris, à la Dent-du-Salantin (2482 m), au-dessus de Vernayaz, ainsi qu’à la Dent-de-Morcles (2969 m).
La Valaisanne espère que son Tinder des montagnes connaîtra bientôt le même succès que celui de Thibaud Monney. Et compte bien, comme lui, trouver prochainement le grand amour dans l’un de ses petits carnets.
La nature comme premier rendez-vous
Trouver l’amour en montagne sans avoir à crapahuter jusqu’au sommet, c’est aussi possible. Dans le canton de Fribourg, l’association Rencontres et Découvertes organise des sorties en nature destinées aux célibataires âgés de 50 à 70 ans. Randonnées, balades à raquettes, initiation au tir à l’arc, raclettes en plein air ou encore virées en canoë, ces activités ont lieu toute l’année et réunissent entre quinze et vingt participants en moyenne. Cette association a été créée par Marianne et Dom Bullot, 59 ans et 61 ans, un couple marié depuis 2015, dont la rencontre eut lieu lors d’une randonnée il y a quatorze ans.
«Étant seule depuis un moment à l’époque, je m’étais mise à organiser avec une amie des sorties pour réunir nos connaissances célibataires. Un jour, alors que j’avais planifié une sortie au Moléson, cette amie a incité mon futur mari, établi dans le canton de Fribourg, à se joindre à l’équipe. C’est comme cela que nous nous sommes rencontrés», raconte Marianne Bullot. Désireux de pouvoir offrir la même chance à d’autres célibataires, le couple a créé son association en février 2021. Pari réussi: en quatre ans, celle-ci a déjà permis de former une trentaine de couples.
+ d’infos www.rencontres-decouvertes.ch
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