Les vinaigres de fruit apportent de la douceur aux salades
Au premier étage de l’Agropôle de Molondin, tandis qu’on entre dans une salle pleine de jerricanes remplies de fruits en fermentation, de forts effluves de vinaigre gagnent les narines. Mais cette odeur de prime abord acide recèle un autre parfum: une note de fruit rouge, discrète et sucrée.
À l’origine de ces émanations, une cuve métallique débordant de vinaigre crémeux de framboise, que Clément Gindrat brasse doucement. «Le secret est d’ajouter du concentré de fruit après l’acétification», explique cet ingénieur en technologie alimentaire et spécialiste en gestion de projet pour la petite équipe de Cogiterre.
Ecologique et solidaire
La fabrication du vinaigre est un processus assez simple mais long, que Cogiterre perfectionne depuis 2009. Formée de cinq personnes, la petite société vend depuis l’année dernière ses produits sous la marque «Delleycious», inspirée du patronyme d’Alain Delley, l’un de ses collaborateurs. Pour la confection des produits, une ligne de conduite écologique et sociale a été adoptée. La première étape consiste à sélectionner les ingrédients.
Cogiterre se fournit chez des producteurs ultra locaux. «Nous ne négocions pas les prix avec eux, qui nous vendent leurs produits au tarif qu’ils estiment être correct, poursuit Clément Gindrat. Cela correspond à la vision égalitaire et respectueuse de tous les partenaires qui est celle de Jean-Marc Tendon, le fondateur de Cogiterre.» Certes, la marge est moins grande, mais une économie responsable est pour cette entreprise un critère plus important.
Le producteur: Alain Delley
Originaire du petit village de Delley dans le canton de Fribourg, Alain Delley est, à la base, technologue en industrie laitière. Mais à 37 ans, suite à des réactions allergiques, il s’est vu obligé de faire une reconversion professionnelle. Il se retrouve donc à l’institut agricole de Grangeneuve, où Jean-Marc Tendon, fondateur et alors unique membre de Cogiterre, deviendra l’un de ses mentors. Devenus amis, ils partagent un intérêt commun pour l’Afrique et l’Amérique latine et décident de monter un projet humanitaire de laiterie au Burkina Faso. En 2012, Jean-Marc Tendon l’invite à rejoindre Cogiterre pour travailler sur ce qui deviendra la future ligne de vinaigres de fruit «Delleycious», à qui Alain Delley a donné son nom. Aujourd’hui, il est responsable de l’atelier de production à l’Agropôle de Molondin et participe activement aux nombreux projets en développement de la petite entreprise, comme la création de soft-ice issus de fruits du terroir fribourgeois et vaudois.
Sélection minutieuse
Dans le choix des fruits aussi, les vinaigres Delleycious se démarquent de la norme. Abricot, framboise, pomme, poire à botzi ou même kiwi: les saveurs sont nombreuses et étonnantes, et des nouveautés sont déjà prévues. «Nous aimerions réutiliser les invendus de fruits plus exotiques, comme par exemple les mangues», explique Clément Gindrat.
Place ensuite à la deuxième étape, la fermentation alcoolique par les levures, qui prend environ deux semaines. Après quoi le mélange fermenté est décanté pendant une journée et ainsi prêt pour la phase la plus cruciale: l’acétification. Au fond de l’atelier de l’Agropôle, l’appareil dévolu à cette tâche tourne bruyamment sous l’œil attentif d’Alain Delley, technicien agro-alimentaire et responsable de l’atelier de production. La machine injecte des microbulles d’air dans la préparation de framboises fermentées pour aider les bactéries à transformer l’alcool en acide acétique. Une fois le processus terminé, le vinaigre devra encore reposer pendant trois mois.
En petites quantités
L’acétificateur peut produire environ 200 litres par jour. Les vinaigres de Cogiterre sont vendus dans des petits magasins ou directement chez des producteurs de fruits, et bientôt sur le site internet de l’entreprise. En parallèle, celle-ci loue son matériel pour que les agriculteurs puissent également venir faire leur propre vinaigre. Il faut dire que les cinq collaborateurs ne sont jamais à cours d’imagination. «Nous sommes en train de réfléchir à la création d’un acétificateur mobile, raconte Clément Gindrat. La machine, transportable dans une remorque de camion, pourra voyager entre les différents producteurs, à l’image des bouilleurs de cru ambulants.»
Alain Delley s’apprête maintenant à passer à la dernière étape avant l’embouteillage. Dans une cuve de métal, il verse le vinaigre reposé, puis y mélange du sucre et du concentré de framboise. Le responsable de production contrôle ensuite le taux d’acidité, qui pour un vinaigre crémeux devrait se situer à 4.5%, avant d’envoyer par tuyaux le produit à l’étage du dessous. Là, Karine Litwin, dernière arrivée de la petite équipe, s’occupe d’embouteiller et d’étiqueter le vinaigre de framboise. Désormais prêt à être livré, il ravira les papilles gustatives des plus grands amateurs de salades.
Acide bénéfique pour la santé
C’est aujourd’hui une évidence scientifique, consommer du vinaigre est excellent pour le système digestif. L’acide acétique – la molécule responsable de l’acidité et du goût si particulier du vinaigre – contribue notamment à limiter l’augmentation du taux de sucre dans le sang. Un repas riche en féculent devrait donc toujours s’accompagner d’une salade. De plus, grâce l’utilisation des levures et des bactéries dans les processus de fermentation et d’acétification, le vinaigre a également des vertus probiotiques. C’est-à-dire qu’il permet de réguler la flore intestinale et ainsi d’aider à une meilleure digestion.
+d’infos Cogiterre
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